samedi 21 février 2009

Vous avez dit LEAN Management ?


On a vu apparaître il y a quelques années (c’est récent) une coccinelle VW, copiée sur l’ancien modèle un peu plus spacieuse, un peu plus luxueuse, et un peu plus chère. Puis, plus récemment, une nouvelle Austin mini copiée sur l’ancien modèle, un peu plus spacieuse, un peu plus luxueuse et un peu plus chère. Enfin dernièrement, ce fut le cas d’une nouvelle Fiat 500 copiée sur l’ancien modèle, un peu plus spacieuse, un peu plus luxueuse, et un peu plus chère.
Dans l’industrie, le marketing fait aussi des ravages et en particulier avec un nouveau LEAN Management, copié sur l’ancien modèle (des années 80), un peu plus volumineux, un peu plus étincelant et bien entendu un peu plus — vous m’avez compris — cher !
La crise aidant, il est normal que chaque entrepreneur se soucie de ses coûts de production et cherche à faire des économies et le LEAN Management est un principe de réduction des coûts qui a fait ses preuves.
Hélas, on trouve souvent dans cette nouvelle présentation un salmigondis de méthodes sur lesquelles on a fait un peu de ménage pour en enlever la poussière et que l’on présente comme la nouvelle caisse à outils du Lean.
On trouve pêle-mêle, dans cette jolie boîte, du SMED, du 5S, des méthodes de résolutions de problèmes, de la TPM, bref, des méthodes qui certes sont très utiles dans des situations bien spécifiques mais qu’il convient de mettre en œuvre avec discernement et après avoir identifié l’objectif à atteindre.
Cela n’est pas du Lean.
Le Lean (qui veut dire maigre) est une approche organisationnelle visant à éliminer tout travail inutile, qui n’apporte pas de valeur ajoutée. Jusque là, rien que de très logique que d’éliminer ce gaspillage. Mais il convient cependant de procéder avec ordre et méthode.
Il faut d’abord appréhender le Lean à travers une vue systémique de l’organisation. Il ne sert à rien de réduire des tâches qui semblent inutiles sans se préoccuper de l’amont et de l’aval.
Le premier constat à faire est d’identifier parfaitement les exigences des clients et d’autres éléments contraignants de notre milieu environnant (règlementation, technologie, etc.). Ensuite, il conviendra d’identifier les composantes qui sont en « front office » c'est-à-dire au contact direct des clients et qui fournissent les prestations attendues. Une approche processus intelligente (celle qui consiste à identifier les entrées et sorties de chacune des composantes de l’organisation et de les confronter ensuite) est nécessaire. En effet, il convient de vérifier que ce qui est produit par les composantes du « front office » correspond exactement à ce qui est attendu par le client (ni plus, ni moins). Comme ce ne sera pas le cas, nous éliminerons lors tout ce qui est superflu (la surqualité). Ensuite, grâce à la connaissance des interrelations entre les composantes, nous remonterons à partir des processus du « front office » vers ceux qui les alimentent en données d’entrées. Nous demanderons alors aux composantes du « front office » de définir leurs besoins stricts en éléments entrants, nécessaires pour leur permettre de fournir leurs clients. Nous confronterons ce que ces composantes de premier niveaux attendent (leurs exigences) avec ce qui leur est fourni par les composantes qui sont en amont. Et nous éliminerons ce qui n’est pas utile et ce qui n’est pas nécessaire.
Et ainsi de suite. Ceci est le premier travail et c’est du Lean.
Puis, dans un second temps, nous nous intéresserons au chemin parcouru par les prestations effectuées (les produits). Pour cela, il nous faudra un décamètre, une feuille et un crayon. Lorsque nous aurons dessiné le chemin parcouru par les objets que nous produisons, nous raccourcirons impitoyablement les circuits. Les chariots élévateurs, les stocks intermédiaires, les manutentions et les transports en général sont des ennemis de la performance.
Nous changerons la culture des cadres et des agents de maîtrise. Ils sont au service de leurs personnels. Ils doivent les former, les aider, à la manière d’un capitaine d’une équipe sportive qui est devant, qui est derrière, qui est sur tous les fronts et qui permet à son équipe de donner la meilleure performance.
Nous changerons la culture des fonctions supports qui, elles aussi, doivent être au service de la production. Elles ne doivent produire que des éléments qui aident les fonctions de production à accomplir leurs tâches au plus juste nécessaire. Il ne faut pas faire du Lean que dans les fonctions de production car il y a souvent plus à gagner dans ces composantes là que dans celles que l’on organise depuis des décennies et qui, si elles peuvent encore faire des économies, ne constituent pas le plus gros potentiel. Dans nos entreprises, les composantes de support (la main d’oeuvre indirecte comme on l’appelait autrefois) est souvent aussi importante que la main d’œuvre directe (les composantes de réalisation).
Il est étonnant de constater que le Lean Management n’est que de l’approche processus conduite avec efficacité.
A propos d’outils, il ne faut pas mettre en œuvre des méthodes spécifiques avant d’avoir fait cette opération de réduction des tâches inutiles en partant des interactions et en partant du client puis en remontant les composantes en amont. Inutile de faire du 5S avant parce qu’il est certain que des outils seront éliminés en même temps que les tâches inutiles qu’ils servaient.
On fera du 5S (ou toutes autres méthodes citées précédemment) lorsque la cure d’amaigrissement aura été conduite à son terme et que l’entreprise aura perdu ses kilos superflus. Mais ce n’est plus du Lean. C’est de l’organisation classique d’amélioration des performances. Cela ne signifie pas qu’il ne faut pas en faire naturellement. Mais n’oublions pas que le Lean c’est maigrir, c’est éliminer la surcharge pondérale qui nous empêche de courir, de sauter de rebondir et qui nuit à notre souplesse.

Nota : Derrière le terme de « composantes », vous pouvez y mettre ce que vous voulez : des processus, des fonctions, des départements, des services, etc.
Un grand principe : « c’est celui qui travaille qui sait ».

1 commentaire:

Serge a dit…

Sur le fond, je suis rassuré de constater que nous partageons les mêmes visions...
Sur la forme, tu as essayé de faire du lean sur ta photo ? Je pensais qu'un qualiticien ne devais présenter que des indicateurs reflétant la réalité...